Transit Gallus gallus - Par Michel Derouet

L’objet de l’expérience consiste à tester la germination des graines de cactus après passage dans un tractus digestif. C’est un thème récurrent sur les forum et une hypothèse parfois avancée dans les publications. À part Mandujano (1997) qui l’a vérifiée sur le corbeau avec les graines d’Opuntia rastrera, les chiffres sont inexistants.

L’Homo sapiens n’ayant pas vraiment co-évolué avec les cactus, j’ai choisi le tractus digestif d’un oiseau. Seul, Gallus gallus a bien voulu se prêter à cette distraction.

Prenez deux beaux poulets (vivants !), en l’occurrence de souche commerciale chair “ROSS“, âgés de 4 semaines et pesant :
- Poulet A, 1280 g
- Poulet B, 1350 g
Bref, des bêtes avec un appareil digestif au summum de son rendement.

JOUR 1
Il ne reste plus qu’à leur faire ingurgiter les graines de cactus en début d’après-midi après trois ou quatre heures de jeûne. Ainsi, ils se jetteront sur leur aliment habituel qui “poussera“ les graines.
Les graines ont été choisies pour leur faible pouvoir germinatif testé dans des expériences précédentes, sauf pour celles d’Opuntia ficus indica, non semées en lot témoin (par moi) car on sait que cette espèce est proche de zéro. Mais comme il s’agit de la référence 1046 ARIDES, parmi vous certains ont peut-être un chiffre à me donner ?
Deux espèces de graines sont associées par poulet (autant rentabiliser la manip), facilement différenciables sur leur forme, leur couleur ou leur grosseur.

Poulet A
- Echinopsis subdenudata x E. sp fleur blanche, 30 graines
- Epiphyllum “chauncey“ x E. sp “d’Oe “, 30 graines

Poulet B
- Eriosyce islayensis, (AD3) 20 graines
- Opuntia ficus indica (ARIDES 1046) petites 15 et grosses 15

Le lendemain matin, il ne restera plus qu’à récolter les graines.

JOUR 2
Récolte des feces.

- Echinopsis subdenudata x E. sp fleur blanche, 24 graines/30
- Epiphyllum “chauncey“ x E. sp “d’Oe “, 25 graines/30
- Eriosyce islayensis, (AD3) 17 graines /20
- Opuntia ficus indica (ARIDES 1046) 20/30

Toutes les graines ne sont pas au rendez-vous. Le poulet est une arme à la balistique aléatoire et le fût du canon, difficilement maîtrisable, ne refroidit jamais. D’où des dégâts collatéraux avec perte de munitions. Ensuite, le transit du poulet B peut avoir été ralenti par Opuntia dont on sait qu’elle peut aller jusqu’à provoquer des occlusions intestinales chez les enfants et les vieillards. Et peut-être aussi chez les poulets…

Par ailleurs, il est indispensable de voir si le passage dans le système digestif du poulet n’inhibe pas la germination de graines connues pour bien germer, sans parler de différences pouvant se manifester sur l’efficacité digestive de l’oiseau. Il y a des poulets plus ou moins bons digesteurs.

Donc, ce jour 2, après la récolte des graines digérées, il leur est à nouveau donné une ration de 32 graines chacun, de la même référence germant à 96% :
Echinopsis oxygona x E. sp fleur blanche

JOUR 3
Récolte des feces.

Poulet A
- 30/32 graines Echinopsis oxygona x E. sp fleur blanche
- + 1 Echinopsis subdenudata x E. sp fleur blanche
- + 2 Epiphyllum “chauncey“ x E. sp “d’Oe “

Poulet B
- 17/32 Echinopsis oxygona x E. sp fleur blanche
- + 1 Opuntia ficus indica
- + 1 Eriosyce islayensis

On recueille donc avec retard des graines ingurgitées le premier jour. Le poulet ayant préalablement eu à digérer Opuntia, a rejeté beaucoup moins de graines d’Echinopsis. Peut-être sont-elles seulement retardées ? Les circonstances de la manip ne m’ont pas permis de le vérifier.

JOUR 5
Semis en sachet et mise en couveuse aux conditions habituelles.

RESULTATS
Au bout de 6 semaines :

gallus gallus

CONCLUSION

Le passage dans le tractus digestif du poulet n’améliore pas vraiment la germination des espèces testées, sauf peut-être Epiphyllum pour lequel il faudrait confirmer avec un protocole qui permette d’avoir des chiffres exploitables statistiquement.
On peut même constater que ce traitement inhibe plus ou moins la germination de graines d’Echinopsis oxygona x sp à fleur blanche, selon le poulet (26% et 64%) alors qu'elles germent à 96% sans traitement.
Certes, il ne s’agit pas d’un oiseau indigène et les poulets utilisés n’avaient pas encore eu l’occasion de picorer des cailloux qui, normalement, restent dans le gésier des oiseaux et abrasent les graines.
Cette expérience inédite (à ma connaissance...) à défaut d'apporter des réponses solides, permet au moins de se poser la question de l'efficacité du transit des graines dans le système digestif des oiseaux.



 

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